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19, rue du Colonel Fabien

 

Héliane Donatien

 

 

 

 

 

Elle est construite en 1929-30 sur 400 m2 de terrain achetés à Mr et Mme Pierre Hibert, ce propriétaire cité par Mauricette et François dans l’histoire de la maison de Vincent et Nathalie Firmin. Cette belle maison blanche d’Héliane a une longue histoire à vous raconter en plusieurs épisodes.

 

Les deux maisons jumelles

 

Son originalité vient de ce qu’elle est le résultat d’une alliance entre deux amis qui décident de faire construire deux pavillons jumelés, avec un seul mur séparatif mitoyen, sur un terrain relativement réduit, au moyen de 2 prêts contractés auprès de la même Société Mutuelle Rouennaise de Capitalisation. Chacun des pavillons a son entrée particulière à chaque extrémité de la maison actuelle. Chacun porte un numéro différent dans la rue Antoine Herbron, mais les caractéristiques intérieures sont identiques.

 

Les deux amis s’appellent  Edmond Lucas et Louis Grolleau (qui n’aura pas la chance de son nom). Ils ont tous deux la trentaine. Ils sont mariés. Edmond et Hélène n’ont pas d’enfants. Louis et Yvonne ont deux garçons : Robert 8 ans et Roger 5 ans.

 

Edmond Lucas installe son foyer au n°19. Il est marbrier (ce qui explique qu’Héliane trouvera plus tard quantité de plaques de marbres dans son jardin !).

Louis Grolleau et sa famille prend possession du n°21.

 

Les deux amis créent autour d’eux une bonne entente entre voisins car pour plus de confort et obtenir le gaz de ville, il faut faire monter la colonne de gaz qui s’arrête dans la rue Antoine Herbron à la maison de Monsieur Roux (actuellement maison de Jean-Luc et Nadia Dargent) ce qui représente une longueur de 140m.

 

Pour cela, une convention est conclue entre la compagnie du gaz de Versailles et les propriétaires suivants : Elie Besnard (arrière grand-père de François) qui sera chargé de rassembler les fonds et se branchera au passage, Fernand Jaloustre (maison actuelle des Topalian) qui en fera autant, puis les deux nouveaux propriétaires et enfin Pierre Hibert (maison de Vincent et Nathalie Firmin).

 

Cette convention sur laquelle nous retrouvons les signatures originales, explique la servitude de passage de 2 mètres de largeur, existant depuis 1930, entre la maison des Topalian et celle d’Héliane pour desservir en gaz de ville la maison de Vincent et Nathalie, reliée ainsi à la rue du Colonel Fabien.

 

L’environnement est agréable et tout semble aller pour le mieux.

 

La maison du n°21

 

Soudain, tout bascule.

Louis Grolleau meurt dans son pavillon encore tout neuf le 19 Juillet 1934, à l’âge de 35 ans, laissant une veuve et deux orphelins, aux prises avec les liquidateurs judiciaires de la Société Mutuelle de Capitalisation, qui vient de faire faillite le 7 avril 1933, sans avoir exigé d’assurance vie de ses emprunteurs.

 

La suite ne se fait pas attendre : Yvonne Grolleau, 34 ans, est sommée de rembourser l’intégralité de la dette de la maison : capital et intérêt, ce que, évidemment, elle est incapable de faire. Les créanciers vont donc entamer la procédure de vente du pavillon.

 

En fait, les choses vont traîner car il y a d’un coté la faillite et de l’autre les enfants mineurs. Puis survient la guerre et le pavillon n°21 ne sera mis en adjudication qu’en 1943, et la vente définitive avec les intérêts courus depuis 1934, n’interviendra qu’en 1947.

 

Dés 1935, Yvonne Grolleau, après la mort de son mari, se réfugiera avec ses enfants à Paris, prés de ses parents. Cependant, elle restera avec ses deux garçons, héritiers mineurs de leur papa, propriétaire en titre de cette maison, qui restera vide jusqu’en 1941.

 

A cette date, elle est réquisitionnée par l’administrateur de la commune de Viroflay, faisant office de maire sous l’occupation allemande, au profit d’une famille demeurant à Vélizy-Villacoublay, qui vient d’être victime d’un bombardement par les forces aériennes alliées.

 

Mauricette et moi faisons alors connaissance avec Monsieur et Madame Maurice et Alice Guingamp et leurs trois enfants : Michel 9 ans, Yolande 8 ans (qui deviendra une bien jolie fille dit Emile Mandonnet), et Gérard 4 ans.

La famille Guingamp restera locataire de son pavillon jusqu’en 1968. C’est dire que nous avons vu grandir les enfants qui sont devenus respectivement Médecin, Secrétaire de direction et Ingénieur.

 

Nous avons retrouvé la famille à Fontenay le Fleury où elle demeure depuis 1968. Nous saluons respectueusement madame Alice Guingamp qui a 89 ans, la mémoire de monsieur décédé en 1985, et disons le bonjour à toute la famille.

 

La maison du n°19

 

Après la mort prématurée de leur ami Louis Grolleau et les ennuis créés par la faillite du prêteur, Edmond Lucas et son épouse n’ont plus envie de demeurer dans cette maison qu’ils affichent “ A vendre ” dés 1936.

 

A cette époque, une famille parisienne petitement logée avec deux garçons turbulents, cherche à louer une maison en banlieue.

Madeleine, la maman, est amie avec une personne qui habite le parc du Mesnil (à Chaville tout proche) et qui lui parle avec enthousiasme de notre quartier de verdure et de calme aux bords de la forêt de Fausses-Reposes.

 

Louis, le papa, vient faire un tour et constate que cette maison est “A vendre” et ferait bien l’affaire de ses deux garçons : Bernard 8 ans et Daniel 5 ans.

 

Daniel Adt, 30 ans plus tard, sera la matière grise et fera partie du trio : Caquet, Adt et Lemaire qui concevra le projet d’une nouvelle rue, pour faire sortir le “ Colonel Fabien ” de ses ornières, mais pour l’instant, il s’amuse beaucoup avec son frère Bernard.

 

Louis Adt n’a pas l’intention d’acheter lui même la maison mais il en parle à son employeur.

 

Le docteur Moure, son Patron, chirurgien des Hôpitaux de Paris a pour Louis Adt une estime considérable. Après l’avoir embauché comme chauffeur de Maître en 1923, il est devenu infirmier, son assistant opératoire préféré.

 

Le docteur Paul Moure n’hésite pas un seul instant : par un acte de vente du 13 Mars 1936 de Mr et Mme Edmond Lucas à Mr le docteur Moure, il acquiert la maison libre du n°19 qu’il loue à “ son cher Louis ”.

 

Laissons Daniel raconter :

 

“ Donc en 1936 débarque la famille Adt au n°19. A notre arrivée et jusqu'à la déclaration de guerre, le 21 est inhabité.

Peu de temps après, le docteur acquiert pour le compte de Louis une parcelle située entre le 21 et la sente de la procession où existait un garage. Le garage fut retiré, ce qui nous permit d’étendre notre jardin sur l’ensemble de la surface actuelle (Cela fut bien bénéfique pendant l’occupation). ”

 

Le texte de l’acte de vente de ce terrain daté du 22 Décembre 1936, précise qu’il a la forme d’un parallélogramme d’une contenance de 290 m2. La vente est faite au Dr Moure par les héritiers Van Goëns (Madame Gertrude Van Goëns et son mari Franck Jezequel dont nous avons déjà parlé et dont nous reparlerons ultérieurement).

 

Il précise aussi que le garage en fibrociment qui se trouve sur le terrain reste la propriété des vendeurs qui s’engagent à le déplacer au cours de l’année 1937.

 

Ce garage effectivement déplacé et plus tard incendié, restera dans les souvenirs d’Héliane. Elle vous le dira elle-même.

 

“ En 1939, continue Daniel, lors de la déclaration de guerre, nous étions en Limousin avec maman chez nos grands-parents.

Papa fût mobilisé. En 1940, à notre retour, après la suspension des hostilités, nous retrouvons notre maison pillée par les allemands.

Entre 1941 et 1944, le jardin magnifiquement cultivé par papa, nous fournit le complément de nourriture tant apprécié. Nous cultivons également une parcelle louée dans le terrain de Mr Boulay (le papa de Mauricette avait la garde du “ champ ” appartenant aux époux Van Goëns-Jezequel). Il y avait d’autres jardiniers. ”

 

Mr et Mme Louis Adt sont témoins, en 1943, de l’événement créé par la vente aux enchères publiques de la maison voisine du 21. Averti, le Dr Moure qui possède déjà le pavillon du 19 et le terrain situé au dessus du 21 ; se porte enchérisseur. La mise à prix est de 50.000 francs (de l’époque). Il fait monter les enchères à 180.000 francs et remporte l’adjudication.

 

Pour les raisons déjà dites, la vente définitive n’aura lieu, selon l’acte officiel, que le 31 décembre 1947.

Entre temps, le 13 octobre 1947, un nouveau malheur viendra frapper la famille Grolleau : Roger “ meurt pour la France ” à Saigon, pendant la guerre d’Indochine. Il a 22 ans.

 

1948 : tout en continuant de louer les deux maisons qui lui appartiennent, le docteur Moure qui a maintenant 65 ans, juge opportun de prendre sa retraite dans les Pyrénées Atlantiques.

 

Mais sa décision subite surprend son homme de confiance qui, du jour au lendemain, se retrouve sinon sans logement, au moins sans emploi, à l’âge de 48 ans, après 25 ans de bons et loyaux services, tandis que ses deux fils qui ont respectivement 20 et 17 ans poursuivent leurs études.

 

Qu’à cela ne tienne, Louis Adt qui connaît la radio et l’électricité se retrouve, nous dit Daniel, électricien responsable du service entretien du cynodrome de Courbevoie (Courses de lévrier dans le stade voisin de la gare de Courbevoie).

Mais les lévriers s’arrêtent de courir en 1951 !

 

Louis devient alors chauffeur de taxi.

 

A ce titre et à celui d’infirmier, il rend de grands services à tous ses voisins. Emile Mandonnet se souvient de sa gentillesse et aussi de son chien “ Figaro ”.

Mr et Mme Louis Adt, après l’envol de leurs garçons, resteront encore longtemps parmi nous et nous témoignons, Mauricette et moi, de leurs qualités de sourire et de disponibilité. Ils sont partis en retraite à Rochechouart en Haute Vienne en 1963 et sont décédés Louis en 1985 et Madeleine en 1992, dans leur 86ème et 87ème année.

 

Merci à Véronique et à Fabienne Adt pour le bon souvenir que nous ont laissé leurs grands-parents.

 

1964 : La réunion des 2 maisons :

 

Le départ pour la province des parents de Daniel inspire aux parents de Véronique Adt qui vient de naître le 8 Juin 1964, l’idée d’acheter les deux maisons dans le but de les unifier un jour.

 

Cela a lieu sans tarder car les consorts Moure acceptent bien volontiers de vendre aux consorts ADT la totalité des propriétés des 19 et 21 de la rue du Colonel Fabien, en date du 31 Juillet 1964.

 

Après la naissance de Véronique, Héliane a ramené sa fille au 8 de la rue Gallieni, mais au retour de maternité avec Fabienne née le 23 Juin 1966, c’est dans la nouvelle maison du n°19 que sa maman l’installe.

 

Héliane n’oubliera jamais ce jour là. Elle raconte :

 Il faisait très chaud en ce début de Juillet. En arrivant avec mon nouveau né, j’aperçois des flammes qui sortent du garage plus ou moins abandonné, situé un peu au dessous de la maison de Mr et Mme Mandonnet.

En quelques minutes, le feu se propage à l’énorme châtaignier pourtant encore tout vert, situé à quelques mètres du garage et le châtaignier s’enflamme à son tour et se transforme en brasier d’une intensité effrayante.

Les pompiers sont arrivés mais n’ont rien pu faire. Ils cherchaient de l’eau partout mais tout a été détruit : le garage et l’arbre. Je m’en souviendrai toute ma vie. ”

 

Comme il fallait s’agrandir, la famille Adt donne congé à la famille Guingamp et Daniel entreprend et dirige les travaux de rénovation, transformation et unification de la maison telle que nous la connaissons aujourd’hui avec son style “ Ile de France ” et sa clôture normande.

 

Daniel et Héliane font don à la Commune de Viroflay de nombreux mètres carrés de terrain, pour l’élargissement de la rue du Colonel Fabien et la sente de la Procession. Le sens civique de tous les habitants propriétaires des maisons des numéros impairs de la rue du Colonel Fabien, a permis que les réserves prévues dans nos actes de propriété soient mises en pratiques dans l’intérêt général.

 

Héliane parachèvera le tout avec la construction d’un garage, lui permettant de protéger sa voiture et d’éviter bien des ennuis.

 

C’est dans ce garage, qu’au soir d’une tournée forestière, en 1991, l’Association de la Rue du Colonel Fabien dégusta le délicieux punch au rhum blanc de la Martinique, dont seule Héliane a le secret.

 

Notre amie, qui est maintenant grand-maman, a été notre présidente de l’Association de la rue du Colonel Fabien, pendant plusieurs années, entre les règnes de Susan Clot et de Sabine Besnard.

Nous la remercions pour sa gentillesse et sa discrétion, notamment lorsqu’il s’est s’agi de redonner à son propriétaire légal, la bande de terrain de 2 mètres qui se situait entre les deux propriétés des N° 19 et 17 de la rue du Colonel Fabien.

 

C’est elle aussi qui a voulu ne pas faillir à la tradition, en nous laissant le souvenir du punch merveilleux de sa Martinique natale, pour mettre en route la dernière rencontre  du 30 juin 2007 pour l’au-revoir à tous nos amis du quartier des Sables.

 

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